samedi 28 novembre 2009

Quelques actualités de la région de Huehuetenango.

La 6e Semaine de diversité biologique et culturelle

C'est à Yalambojoch, situé dans la municipalité de Nenton, département de Huehuetenango, tout près de la frontière mexicaine, que s'est tenue la 6e Semaine de diversité biologique et culturelle du 15 au 19 novembre dernier. Au cœur des montagnes Cuchumatanes et de la région culturelle Chuj, cette communauté fut l'une des plus affectées par le conflit armé interne dans les années 1980. Le film La Hija del puma qui relate ces événements y prend justement lieu. Il s’agit d'une petite communauté qui regroupe environ 300 familles qui vivent essentiellement d'agriculture, d'artisanat et de commerce local a petite échelle. À cette époque de l'année, le climat y est assez froid; pas seulement assez froid pour un pays du «sud», mais réellement froid selon mes propres références. Merci à mon sac de couchage conçu pour le climat québécois!

Le choix de ce lieu n'était pas innocent. En effet, un des lieux clés de la région est la «Laguna Yolnabaj», mieux connue sous le nom de la Laguna Brava, est actuellement menacé par des investisseurs étrangers qui veulent en faire un complexe touristique. Il est actuellement question de privatiser cette lagune de 4km2 très riche en biodiversité. Pour l'instant, il s'agit toujours d'un territoire géré par les gens de la région dans le cadre d’un projet de tourisme communautaire. De plus, le lieu est grandement menacé par un projet d’autoroute controversé, la Franja Transversal del Norte, qui devrait éventuellement passer par là.

Le processus de la Semaine pour la diversité culturelle et biologique avait été initié en 2001 à San Cristobal de las Casas, au Mexique et avait rassemblé 400 personnes. La thématique principale de cette première semaine avait été les impacts de l'implantation du Plan Puebla Panama. Les Semaines suivantes se sont successivement déroulée à Quezaltenango au Guatemala, au Honduras, au Salvador et à Colotenango au Guatemala. Il s'agit donc d'un processus de rencontre entre les différents peuples d'Amérique centrale, organisations de base, leaders communautaires et organisations de défense du territoire afin d'établir des stratégies et des alternatives face aux menaces posées par les mégaprojets et les impacts du modèle néolibéral.

Cette année, l'événement a rassemblé environ 600 personnes de la région. C'est donc dire que presque tous les membres de la communauté étaient impliqués, soit en hébergeant des participants, en cuisinant ou en aidant au niveau logistique. Personnellement, c'est probablement cette caractéristique qui m'a le plus impressionné pendant la semaine. Vraiment, c'était un bel exemple de solidarité et d'échange. Au départ, j'ai eu un peu peur que tant de personnes qui envahissent une si petite communauté en même temps causeraient probablement plus de dommages qu'autre chose. Finalement, je pense que le comité organisateur avait assez bien prévu la chose, au niveau de la gestion des déchets et du site en général. Sinon, c'est peut-être moi qui n’a rien vu...

Le premier jour, les représentants des différentes délégations (Mexique, Salvador, Honduras, Costa Rica et Guatemala) ont présenté la situation dans leur pays ou communautés respectifs; la situation au niveau environnemental, des mégaprojets, de l'exploitation des ressources naturelles ou des conflits de territoire. Les deux jours suivants, les participants étaient divisés en cinq tables de travail (Territoire et mégaprojets, souveraineté alimentaire, modèle néolibéral, santé des peuples, jeunesse et territoire et femmes, territoire et droits) pour travailler sur des thématiques spécifiques. Pour ma part, j'étais inscrite à la table de travail sur les mégaprojets, et dans la sous table sur l'exploitation minière. C'est un sujet qui m'intéresse beaucoup et qui est particulièrement important dans la région où je travaille. Ce fut l'occasion pour les différents participants d'échanger sur leurs expériences, de partager de l'information et d'élaborer des stratégies à l'échelle de l'Amérique centrale. Il est vrai que le besoin d'une coordination entre les différentes organisations au niveau régional, mais aussi local est très grand. Difficile d'évaluer les retombées concrètes dans l'immédiat, mais a mon avis, l'exercice en valut la peine. De toute façon, mon intérêt pour ce genre de processus est déjà bien connu par la plupart d'entre vous...

Une sortie dans certains lieux d'intérêt de la région avait aussi été organisée le mercredi matin. Des petits ennuis de santé (rien de grave!) m'ont malheureusement forcé à rester un peu plus longtemps dans mon sac de couchage. Mais Tito, mon partenaire de travail a, lui, pu aller visiter la Laguna Brava. La semaine s'est terminée par un marché d'échange de semences et de produits artisanaux et par la lecture de la Déclaration de Yalambojoch, élaborée par les différents groupes de travail.

Dans le cadre de notre travail ici, notre participation à cet événement nous sortait un peu de notre quotidien d'accompagnateurs. Mais très positif dans l'ensemble. Aussi, ce fut une rencontre un peu troublante pour Tito et moi avec la femme qui nous accueillait dans sa maison, et qui cuisinait pour nous. Tous les deux, nous avons ressenti quelque chose d'assez fort en la rencontrant. Difficile à expliquer... un regard tellement triste qu'on ne pourra oublier de sitôt...

http://www.visemanadiversidadbiologica.ceibaguate.org

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La Déclaration des peuples de la région Nord de Huehuetenango libres d'exploitation minière et de mégaprojets.


Le 24 novembre dernier a été célébrée cette déclaration dans la municipalité de San Sebastián Coatán. L'événement avait été organisé par les autorités municipales, communautaires, les organisations locales des peuples mayas Qanjobal, Chuj et Akateko, l'Assemblée départementale de Huehuetango pour la défense des ressources naturelles ainsi que le Conseil des peuples de l'Occident. Cette déclaration souligne la réalisation de consultations populaires dans les huit municipalités de la région Nord de Huehuetenango. Dans ces huit municipalités, la population s'est opposée à l'exploitation minière et aux mégaprojets. C'est la seconde région du département qui célèbre une telle déclaration. En effet, en septembre 2008, cinq autres municipalités avaient fait de même. Il faudra observer les développements au cours de la prochaine année, et voir si l’ensemble du département pourra se déclarer libre d'exploitation minière.

Le processus des consultations populaires revêt une importance particulière ici. En effet, il représente le droit des peuples autochtones à être consulté de manière libre et informée avant que des projets d'exploitation soient mis en place sur leur territoire. Ici, ce droit est reconnu par la Consultation politique et le Code municipal. Au niveau international, le droit à la consultation est reconnu par la Convention no 169 de l'Organisation internationale du travail (OIT). Malgré cette reconnaissance, il est souvent difficile pour les peuples autochtones de voir ce droit respecté de manière entière. D'autant plus qu'aucun de ces instruments juridiques ne reconnaît l'obligation de l'État de respecter les décisions prises dans de telles consultations.

Elyse

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